— Paul Otchakovsky-Laurens

La poésie la vie

Marc Cholodenko

Petit traité de poésie ce livre est aussi partie d’un jour de poésie : l’interrogation sur les métamorphoses du genre, sur l’impossibilité qu’il y a à le définir s’inscrit dans son exercice même. Cela ne cesse pas, ne cessera jamais, s’en va, s’en revient différemment, ou revient ailleurs, avant, après, ne se fixe pas, ne s’attrape ni ne se définit sinon dans l’impossible accumulation de ses définitions contradictoires, passées et à venir, dans l’usage illimité qu’il faut en faire, à propos de tout comme de rien qui en devient tout.


 

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La presse

La sensation du pin maritime



La poésie la vie, sans virgule, est le quinzième livre de Marc Cholodenko. C’est aussi le plus court (60 pages petit format), mais certainement pas le moins dense. C’est enfin, pour l’auteur -romancier traducteur, dialoguiste (les trois derniers films de Philippe Garrel)- un retour à une certaine sérenité via les retrouvailles avec son éditeur Paul-Otchakowsky-Laurens, qui l’avait publié chez Flammarion, Hachette, et dans sa maison P.O.L.
La poésie la vie est « un petit traité de poésie (qui) est une petite partie d’un jour de poésie », un livre plutôt austère mais comme écrit d’un souffle. « La poésie se fait entre ce qui est écrit et ce qui n’est pas écrit. Entre le temps de l’origine et celui de la fin ». Le livre s’organise à partir d’un « évènement » infinitésimal : l’auteur sort d’un petit aéroport en bord de mer et observe un pin maritime. Plus tard, il se promène le long d’un canal et voit flotter, à la surface de l’eau, un écureuil mort. La sensation qui naît alors peut-elle être retranscrite, suggérée ? La poésie se cache-t-elle dans la vie elle-même ou seulement dans l’écriture ? Le livre avance, va et vient, en essayant de circonscrire son sujet, multipliant les définitions, toutes possibles, toutes réfutées, théorèmes-mirages à l’apparente opacité. Ainsi, ce qui se glisse entre la poésie et la vie, à l’endroit de la virgule absente, « c’est le mot qui, compris entre deux autres, les fixe mortellement à leur place entre le silence qui précède leur annonciation et le silence qui lui succède. Mort entre vie et poésie (...) le mot de tous les mots. »
Quant au poète, il est « son propre hasard », « il porte le hasard dans l’humanité ».




Bruno Gendre, Libération, 19 janvier 1995