«J’ai écrit Poèmes fondus pour m’exercer aux cohérences et incohérences graduées dont je projetais de former l’étape suivante État civil. C’est un projet qui m’avait tentée en lisant les registres de l’Etat civil à la mairie de mon arrondissement. Ces registres sont de trois sortes, N pour naissances, M pour mariages et D pour décès. J’avais d’abord remarqué que ce sont, dans l’ordre, les consonnes du mot “nomade”. Mais aussi et surtout, j’avais été frappée par le fait que les renseignements qui sont portés dans ces registres concernent potentiellement...
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«J’ai écrit Poèmes fondus pour m’exercer aux cohérences et incohérences graduées dont je projetais de former l’étape suivante État civil. C’est un projet qui m’avait tentée en lisant les registres de l’Etat civil à la mairie de mon arrondissement. Ces registres sont de trois sortes, N pour naissances, M pour mariages et D pour décès. J’avais d’abord remarqué que ce sont, dans l’ordre, les consonnes du mot “nomade”. Mais aussi et surtout, j’avais été frappée par le fait que les renseignements qui sont portés dans ces registres concernent potentiellement l’espèce humaine dans son entier. D’où le projet d’énumérer tout ce que chacun a en commun avec tous.
Vus de profil et d’un peu loin, les animaux humains ressemblent à des lettres. Comme les lettres, chacun se différencie de tous les autres, comme des lettres, aucun ne peut être coupé en deux par le milieu sans disparaître tout entier. (Les lettres, semble-t-il, résistent un peu mieux que les humains à la mutilation, surtout quand elles sont associées pour former un mot.) De façon générale, comme les lettres, les petits animaux humains ne peuvent survivre et prendre sens que d’être assemblés à qui leur ressemble. »
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Michèle Grangaud donne au monde une étonnante substance, une épaisseur de vérité aléatoire, comique ou pathétique, assez confondante. […] De la naissance et de la mort, de la filiation et du désir, du corps, du sommeil, des villes, de la grammaire, de mille autres choses, elle nous parle – sans filet. Par un biais vacillant entre le particulier et le général, c’est bien une part d’universelle qu’elle donne à entendre.
Le Monde, le 12 juin 1998.
On ne sait par où commencer, par quel bout prendre État civil pour dire ce qu’est ce livre… Tant de choses écrites, observées, perçues, pensées, senties, touchées sont livrées dans ce texte d’apparence autant incontrôlé qu’incontrôlable. Une chose est sûre, il s’agit d’une œuvre totalement aboutie sur le monde qui nous entoure et même plus, dont l’aspect le plus éclatant est qu’il est et sera pour nous lectrices, lecteurs, absolument, intimement, impudiquement contemporain. […] Elle seule peut s’autoriser à écrire « Je est tout le monde », et on lui en veut un peu…État civil est un livre phare dont la capacité lumineuse semble infinie.
Le Matricule des Anges, juin-juillet 1998.