— Paul Otchakovsky-Laurens

La Vraie Nature des ombres

Jean Frémon

Ce sont des fictions, des fables, des randonnées, des apologues, des tableaux, des rêveries, des souvenirs, des propos rapportés. On y croise des personnages qui portent des noms connus : Giotto, Novalis, Pierre Jean Jouve, Marcel Duchamp, Robert Walser, Marcel Proust, Arakawa, Caspar David Friedrich, Edgar Varèse, Tadeusz Kantor, Charles Darwin, Emmanuel Hocquard, Barnett Newman, Caravage, Copernic, Roger Laporte, Ludwig Wittgenstein, J.L. Borgès, Fra Angelico, Michel Leiris, Hermann Broch, Hokusaï et son poulet, Roger Caillois, Saenredam, Yves Klein, André Hardellet, Oblomov, Elias Canetti, Hans Henny Jahnn, Pierre Klossowski, Lucio Fontana, Mendéléiev, Bram van Velde, Jacques Roubaud, Khlebnikov et son chien, E.M....

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Traductions

USA : Post Apollo Press pour Vraie nature des ombres et La Presse Poetry pour "Proustiennes" in Vraie nature des ombres

La presse

Ce livre tient à la fois du récit, de la réflexion, des mémoires, composé d’une série de textes qui mêlent fiction et autobiographie, sans jamais que le « je » ne devienne dogmatique ou bavard comme dans maint ouvrage reposant sur une écriture de l’intime. Dédié à la littérature, à la peinture et à des artistes aimés à travers le temps, il juxtapose divers courts moments, tantôt relation d’imagination, aux confins du rêve, tantôt narration d’événements passés, vécus ou transposés, à partir d’anecdotes personnelles ou liées à des personnages connus. Les ombres, ce sont les morts, qui se promènent dans les toiles accrochés au Musée ou sur l’écran de nos songes, ce sont les ombres aux tableaux de notre existence, impalpables et si présentes, parfois décelables dans telle coïncidence ou tel hasard. De Giotto à Giacometti, d’Elias Canetti à Robert Walser, en passant par Paul Auster et John J. Audubon, les méandres de la rêverie tracent un chemin sinueux qui n’est pas sans charme, tissant des fils invisibles entre les oeuvres admirées et les étapes de la vie de l’auteur. De nombreux passages ouvrent sur l’émotion du lecteur, sur ses parcours intérieurs, qu’il s’agisse de méditations (sur Proust et les aubépines) ou d’événements rapportés (le saisisant souvenir d’enfance de Jacques Dupin avec les folles de l’asile de Privas). A travers le modèle pictural ou littéraire, Jean Frémon réfléchit sur l’éthique et l’esthétique qui ont guidé son avancée, jusqu’au choix de la littérature et à la volonté de faire coïncider l’homme et l’oeuvre dans le temps, à l’instar du visage de Samuel Beckett, d’une beauté austère, miroir parfait d’une oeuvre ascétique, rigoureuse, sans une page de trop. Le récit fragmentaire prend l’allure d’un dialogue imaginaire, avec soi-même ou des êtres de rencontre, quelquefois il emprunte le détour des listes de Sei Shônagon ou de la fable, celle que narrait Pline, avec l’ourse et le bébé ours qui conduisent à comprendre que « le réel est un ourson non encore léché », merveilleuse parabole ! Des préférences sont dites, des amitiés (clins d’oeil à Emmanuel Hocquard, à Jacques Roubaud...), et ainsi se dessine un portrait « en trente-trois morceaux » selon un titre de Char, autre poète essentiel dont la parole sous-tend ce cheminement en quête de réalité. Un livre lumineux qui fait la part belle à la respiration, avec ses zones de silence, que chacun emplira de ses propres chuchotements, avec ses blancs sur la page qui sont la matière d’une réflexion stimulante sur le langage et sur l’art, en perpétuel devenir.


Par Corinne Bayle, Le Nouveau Recueil, décembre 2000.

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Jean Frémon, La Vraie Nature des ombres, Jean Frémon lit "La Vraie Nature des ombres". Extrait.