— Paul Otchakovsky-Laurens

Descentes aux limbes

Patrice Rollet

Nul besoin aujourd’hui de suivre le Christ pour descendre aux limbes, il suffit d’aller au cinéma, dans une salle obscure où s’accomplissent certains de nos désirs les plus inavouables. Cet essai entend explorer ce que Patrice Rollet nomme « les confins du cinéma » - ces limbes cinématographiques vers la périphérie des genres, des images. Passant par plusieurs productions hollywoodiennes de Victor Sjöström, de Leo McCarey, de Jacques Tourneur et de Samuel Fuller ou quelques œuvres underground plus libres de Helen Levitt, Janice Loeb et James Agee, de Stan Brakhage et de Robert Frank, avec en Europe, celles, plus inclassables et solitaires, de Jean-Claude Biette ou de Danièle...

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La presse

Faisant suite à Passages à vide (2002), cette nouvelle compilation de textes parus entre 1990 et 2018 nous invite à explorer les « confins du cinéma ». L’expression se réfère aux points de rencontre du cinéma et des autres arts. Patrice Rollet ne place pas cette rencontre du cinéma et des autres arts. Patrice Rollet ne place pas cette rencontre sous le signe de la confrontation ou de la correspondance mais sous celui de la continuité et de la métamorphose. En reprenant cette idée de Walter Benjamin selon laquelle le cinéma prolonge la littérature, il rapproche, dans un beau texte sur Le Vent de Sjöström, les préceptes du peintre Léonard pour représenter le vent aux procédés choisis par le cinéaste suédois. Il ne faudrait pas croire pour autant que la continuation d’un art par un autre n’est qu’une affaire de chronologie. Pour Rollet, le cinéma de Brakhage s’est trouvé synchrone en son époque avec Pollock et Ezra Pound. Et dans un texte très documenté, il ressort que les Straub pour Amerika/Rapports de classes ont moins choisi L’Amérique qu’ils n’ont été choisis par Kafka, apprenant de lui la défense d’une littérature mineure. Cette conception ne manque pas de renvoyer le lecteur au premier texte du recueil consacré à Manny Farber et à sa fameuse distinction entre « l’art termite » et « l’art éléphant blanc ». En témoignant des genres qui protègent Samuel Fuller du « démon de l’auteurisme », du « style de Leo McCarey que celui-ci ne paraphe jamais ostensiblement » ou de « la pauvreté et de la modestie affichées » de Pull My Daisy de Robert Frank et d’Alfred Leslie, Rollet a choisi son camp. Et c’est en toute modestie qu’à travers ces cinéastes il nous livre (mais le sait-il ?) un sublime autoportrait.


Nicolas Azalbert, Les Cahiers du Cinéma, Février 2020


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