— Paul Otchakovsky-Laurens

Jojo

(première édition, Hachette/P.O.L, 1982)

Gérard Gavarry

« L’Explorateur cherchant Jojo, bottes de cuir aux pieds, à la main sa valise, son plan de Paris et sur la tête le casque colonial. L’Explo traqueur de signes, broussard aventuré parmi les pièges du macadam ou revenu dare-dare cogiter dans sa chambre, à l’Hôtel Nessus et du café Mimile. En butte aux attentions autant qu’au dépit de Madame Othello. Talonné par un tueur à fléchettes. Vampé par une belle divinatrice. L’Explo cherchant Jojo et parfois, en cachette, chuchotant son nom : Jojo ! »

Un personnage, un curieux explorateur, muni de l’attirail ad hoc, cherche à travers Paris un mystérieux Jojo, Jojo dont tout...

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La presse

Récapitulons : d’un côté, deux navigateurs anglais, Clapham et Paddington, qui traversent le canal de Panama ; de l’autre côté, à Paname, leur adversaire, l’explorateur, qui a pris pension chez Mme Othello, à l’« hôtel Nessus et du café Mimile », et qui arpente, case par case, comme un damier, le plan quadrillé de la ville. Tout lui est bon pour chercher un certain Jojo, il a même constitué des dossiers.

Mais le danger rôde, sur le macadam, loin des baobabs, des moustiques, des lampes-tempête et des fleurs carnivores… De çà de là, l’explorateur trouve des indices, des traquenards, des messages à décrypter. « Qui veut goûter le trouble ravageur des terres inconnues, il lui faut y aller de ses petits déchiffrements. » Il y a même une pythie avec un boléro de plumes, c’est dire ! Tempête sous le casque colonial de l’explorateur : fougue, astuce et ténacité ne seront pas de trop pour chercher Jojo, ce Godot farceur.

Attention, un assassin s’est dissimulé dans le rébus. Il y aura du carnage, et on tuera tous les affreux. Ce roman d’aventures parodique, loufoque, plein de rebondissements, tient de Bibi Fricotin et de Raymond Roussel.


Monique Petillon, Le Monde, 16 avril1982


Curieux livre que ce roman de Gérard Gavarry. Un livre tonique et pittoresque qui tourne gaillardement le dos au conformisme littéraire ambiant. Il nous raconte, en effet, les aventures pour le moins singulières d’un explorateur qui arpente le macadam de Paris à la recherche de Jojo, enfin de l’homme qui répond à ce nom.

Cette délirante fiction est minutieusement construite. Rien n’est laissé au hasard. Tout est savamment pesé et, sous son casque colonial, l’explorateur mène la vie dure à ses méninges. Mais attention, ce soin apporté aux plus menus détails n’empêche pas les péripéties et les rebondissements. Ce roman est une sorte de « thriller » à la sauce byzantine.

Avec Jojo, Gérard Gavarry affirme les qualités d’un écrivain authentique à l’écriture incisive et ludique, insolite et vigilante, et à l’érudition savoureuse. On n’est pas loin de Georges Perec, de Jorge Luis Borges aussi. Et, même à l’ombre de ces aînés prestigieux, Gérard Gavarry fait mieux que tirer son épingle du jeu.


Didier Arnaudet, Sud-Ouest Dimanche, 9 mai1982


Le grand art du petit récit


Dans un temps où s’opère l’éviction drastique de l’alphabet au profit du numérique, tout écrivain qui, à la suite de Maurice Blanchot, Queneau, Perec, poursuit « le roman de l’écriture » en replaçant l’homme au cœur de la pluralité des signes est une chance pour la langue.

Parfois aussi pour le rire.

Ainsi en va-t-il du drôle de Jojo de Gérard Gavarry paru en 1982 et que les Éditions P.O.L ont l’heureuse idée de rééditer à l’occasion de la sortie dans la même collection du nouveau récit de l’écrivain : Allada.

Le fait est que ce Jojo-là, tour à tour personnage de « polar », type roman d’espionnage, et Joker d’un vertigineux scrabble qui aurait pour cadre le plan de Paris, entraîne « l’explorateur », cet infatigable décrypteur, dans des situations textuelles aussi rocambolesques que savoureuses. Et saute, à mots parfaitement jointés, en plein dans la spécificité de la littérature.

Ajoutons qu’à travers le déchiffrement de ces curieuses énigmes, cet excellent texte signait déjà, sous forme humoristique, l’entrée de la matière policière dans le roman noble. Veine qui, sur tous les tons, ne cesse de faire école… […]

Nicole Maurice, La Quinzaine littéraire, 16-30 novembre 1993