— Paul Otchakovsky-Laurens

Le Collège du crime

Raphaël Majan

Les vieux camarades de Wallance au Collège évangélique Jésus de Voltaire auraient pu continuer à vivre en paix si ne leur était venue l’idée incongrue d’inviter à une réunion d’anciens élèves celui qu’ils traitaient si mal à l’époque. Mais l’adolescent est devenu commissaire et ne laisse plus rien passer à ces arrivistes qui estiment avoir mieux réussi que lui, à la fois professionnellement et sexuellement. Le policier mélomane fait désormais un usage si personnel du piano qu’un psychanalyste qui était dans sa classe se retrouve définitivement moins familier d’Éros que de Thanatos.

On...

Voir tout le résumé du livre ↓

Consulter les premières pages de l'ouvrage Le Collège du crime

Feuilleter ce livre en ligne

La presse

Raphaël Majan récidive avec deux antipolars à mourir (de rire). Encore plus drôles que les précédents.


Il est très rare de hurler de rire en lisant un roman, plus encore un polar. Alors quand les éditions P.O.L décident de consacrer une collection aux hilarantes «contre-enquêtes du commissaire Liberty» de Raphaël Majan, c’est un acte de salubrité publique. Déjà, avec L’Apprentissage et Chez l’oto-rhino, les deux premiers opus parus au printemps qui sapaient les codes du roman policier, en jouant d’un humour très noir avec une froideur de dandy, en imposant un phrasé qui avance négligemment par métastases futées et détournements, Majan avait convaincu de la double portée, littéraire et désopilante, de ses antipolars. AvecLe Collège du crime et les Japonais, l’auteur qui a travaillé au ministère de l’Intérieur et prétend y être tombé sur les carnets du commissaire Liberty Wallance (spéciale dédicace à John Ford), se lâche encore plus pour narrer les actes du flic, qui s’est transformé en serial-killer. Ça devait finir par arriver.


Reprenons au départ, le commissaire Wallance tuait au nom de la justice, en tout cas de l’idée qu’il s’en faisait, partant du principe qu’en assassinant le premier venu, et en collant le meurtre sur le dos d’un autre inconnu, il réduirait le nombre de délits impunis et contribuerait à sécuriser ses concitoyens. À force, il a méchamment pris goût à l’homicide volontaire, et a commencé à se dire qu’après tout, pourquoi tuer et accuser des inconnus quand on peut régler ses comptes et satisfaire ses pulsions, même les plus étranges ? Résultats, ses anciens camarades de classe, qui ont eu le malheur de l’inviter à une réunion, vont le regretter amèrement (Le Collège du crime). Et quand Wallance se mettra subitement en tête d’assassiner des Japonais, il mettra tout en oeuvre pour y arriver en vain (Les Japonais, donc). Les cadavres pleuvent, le commissaire va toujours plus loin dans l’autojustification hallucinante et la jubilation, que ces trésors de mauvaise foi provoquent chez le lecteur, ne se tarit pas. Bonne nouvelle personne n’a encore tué Liberty Wallance, qui reviendra en 2005.


Raphaëlle Leyris, Les Inrockuptibles, 27 octobre 2004



Mission très accomplie


Chouette : Raphaël Majan ajoute deux nouveaux chapitres, drôle et retors, à sa série policière.


On retrouve en souriant les ruses de la raison wallancienne. Il y a six mois à peine, l’énigmatique Raphaël Majan, qui aurait travaillé au ministère de l’Intérieur, proposait ses deux premières contre-enquêtesLe Collège du crime et Les Japonais permettent maintenant au lecteur de renouer avec un plaisir sans conséquences, selon l’adultérine loi des séries. Toujours en couverture coquette, un montage moderniste et sanglant encore, à intervalles réguliers, les crimes saugrenus perpétrés par Wallance (une Coréenne noyée dans une machine à laver, un psychanalyste écrasé sous son piano non moins souvent, d’anthologiques scènes d’interrogatoire où s’agite absurdement le petit monde des seconds rôles (l’adjoint benêt, le divisionnaire infatué et puis, bien sûr, la saine agressivité sociale dont se nourrit régulièrement le récitMarie-Christine Papillaud née de la Borne, ça faisait plaisir de la voir descendre petit à petit tous les échelons pour se retrouver au bas de l’échelle, le commissaire aurait bien aimé être là quand elle est entrée dans le bureau du juge Aramandes, puis quand elle en est sortie, puis quand elle est entrée dans sa cellule, puis quand elle n’en sort pas.


Peu de choses peut-être, mais des phrases bien tournées, qu’on peut préférer en temps de Toussaint à d’autres divertissements plus prétentieux. D’autant que les intrigues, nonobstant leur caractère éminemment ludique ou invraisemblable, permettent de jeter en passant quelques coups d’oeil finauds sur l’actualité.


Gilles Magniont,Le Matricule des Anges, octobre 2004