— Paul Otchakovsky-Laurens

Let’s let’s go

Frédéric Léal

Il s’agit d’un récit, en ce sens qu’il raconte quelque chose de vécu, et même d’un roman dans la mesure où ce vécu y est tout de même assez bousculé, ne serait-ce que formellement...
Le point de départ : deux amis vont assister à un match de boxe provincial dont l’un des combattants est l’ami d’un de leurs amis. Le match est qualificatif pour les championnats de France. Match extrêmement violent et mouvementé, occasion pour Frédéric Léal, de décrire sous tous les angles et tous les sons possibles, polyphoniquement, cubistiquement, non seulement le match en question, avec quelle efficacité! mais les spectateurs, mais le contexte...

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La presse

Sur le petit ring de la cruauté


De la boxe considérée comme un beau bazar, par un écrivain-ludion au mieux de sa forme.


Frédéric Léal avait déjà bousculé la popote littéraire avec Selva !, formidable dîner de légionnaires où la langue en prenait pour son grade. Avec ce nouvel opus au titre bredouilleur, Let’s let’s go, il campe cette fois-ci un autre décor, celui d’un ring où ça cogne, un ring grand comme une page de livre où les mots volent dans les cordes, plongeant souvent le lecteur dans un « chaos » technique - non sans l’avoir prévenu : « L’intérêt porté à une situation est soumis à mille influences externes dont on a pas conscience sur le coup. » Mais d’abord pour le voir, ce fameux match de boxe, il faut trouver l’endroit où il a lieu. D’où une équipée sauvage en Renault 5, où les propos de deux gus en mal de rounds uppercutent l’émission diffusée à l aradio et envoient au tapis leurs pensées baladeuses. Il est également question d’une fille aux jambes parfaites, d’une panthère noire qui titille la compassion, et d’une tumeur des bourses...

Bref, on s’en doutait, le combat auquel nous convie l’auteur ne se résume pas à l’histoire de deux types qui mettent des gants sans en prendre dès que la cloche sonne. Comme tout drame antique qui se respecte, il y a des choeurs, des dieux ex machina, et pas mal de raisons de raconter autre chose que l’épopée du gnon. Nos deux zozos en virée pugilistique ont des soucis, des envies, des discours qui leur trottent dans la tête, et tout cela forme cacophonie, polyphonie, tout cela se distribue sur la page avec une inventivité qui rappelle Raymond Federman et nous convainc, si besoin était, que la 3 D n’est pas réservée aux massacres assistés par ordinateur. Dans Let’s let’s go, comme dans une salle bondée, et surchauffée où gicle la sueur, pensées et pulsions se bousculent, se marchent sur les syllabes, s’emmêlent les lignes, au point que le lecteur en avalerait son protège-dents, sonné par cette révélation soudaine et salvatrice : mais comment font les autres pour écrire aussi platement ? « On décroche pas la lune en se contentant de circonvolutions sans fin autour de la terre » : c’est Léal qui le dit. Avis aux poids plume.


Claro, En ville


Et aussi

En juin 2018 aux éditions P.O.L et en librairie

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