— Paul Otchakovsky-Laurens

Aube

Joseph Julien Guglielmi

Au départ, la fascination pour un mot, Aube, pour sa rondeur et douceur, pour ce qu’il a de plein : Aube, d’abord, un point qui s’allume sur la paroi noire, un cercle lumineux dans la nuit, une nébuleuse blanche. Puis, son dispersement, sa fusion dans le jour. A partir de tel manque, on a imaginé l’intervalle, le passage de la nuit au jour, entre la nuit et le jour. La page vide, blanche, métaphorique aura été le support, le tableau, le plan où tout apparaît, se forme, se transforme et s’efface, écran mouvant.

 

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Traductions

- Traduction de Rosmarie Waldrop, collection Série d’écriture n°5, Editions Spectacular Diseases, Angleterre, 1991.

La presse

Joseph Guglielmi publie Aube. C’est une suite de vers courts, six ou sept, sans capitales à l’initiale, qui se succèdent et se reprennent comme une phrase interrompue par le silence, le blanc. Au commencement il y a un verbe qui désigne une constatation ou un mouvement « on n’entend rien », « l’intervalle croît dans la suite », « il ne voit pas le jour venir ». Ce sont des vers qui se glissent dans la lecture, sous l’oeil qui est aussi plus que simple regard mais attention flottante. Ce sont des vers aube. Et les aubes ne sont plus navrantes comme pour Rimbaud.


Non, elles sont silencieuses, discrètes, grises ou blanches. Jamais chantantes. Il n’y a pas de lendemain. Il y a constamment le commencement. D’ailleurs ce n’est pas l’aube qui arrive sur le lecteur, c’est le poète qui la guette et feint delui laisser l’effet de surprise. On pourrait, au soir d’une longue veille, tomber sur un secret. Or, il n’y a pas d’autre secret que le pli du poème comme un message griffonné sur un cahier d’écolier. Mais, Joseph Guglielmi est un écolier déçu. Alors il sort, Il regarde le monde. Il apprend la mathématique par le toucher des formes, des volumes : « lignes surfaces et volumes / tout s’écarte / la lueur renverse la ville / une maison s’éteind / et change en portique ». L’aube croît sous ses yeux. La poésie est une maîtrise toute seule avec les yeux. Et les mots qui se taisent le mieux sont ceux qui font de la lumière. Joseph Guglielmi n’a pas de problème de discipline.


BCLF, juin 1984



« Au départ, la fascination pour un mot, aube, pour sa rondeur et douceur, pour ce qu’il a de plein... » L’Aube est entre la nuit et le jour, le passage de la nuit au jour. et la page blanche devient alors, métaphoriquement le support, le plan où toit apparaît, se forme, se transforme. Où le poème est exposé à la violence, à la dispersion. Aube s’inscrit et se lit dans un mouvement fragmentaire de composition/décomposition... Le mot obsessionnel se vide et de sagnification et de sa communication. Il devient une forme, des images vacantes dont la succession trace le contour d’un fantasme : celui de l’écriture, de la composition du livre.


Pierre Descamps, La Feuille de Valenciennes, juin 1984