La Moustache
Emmanuel Carrère
Le mari d’Agnès, un matin, rase sa moustache, sans le lui dire, pour la surprendre. Mais elle ne remarque rien et prend à témoin ses amis, son entourage, appuyée par des photos, pour montrer à son mari qu’il a coupé une moustache qui n’a jamais existé. A partir de ce canular innocent, le monde se dérègle et monte la folie.
« Ayant vidé la poubelle sur le trottoir, il trouva vite le sac qu’on plaçait dans la salle de bains, en retira des cotons-tiges, un vieux tube de dentifrice, un autre de tonique pour la peau, des lames de rasoir usagées. Et les poils étaient là. Pas tout à fait comme il l’avait espéré : nombreux, mais...
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Le mari d’Agnès, un matin, rase sa moustache, sans le lui dire, pour la surprendre. Mais elle ne remarque rien et prend à témoin ses amis, son entourage, appuyée par des photos, pour montrer à son mari qu’il a coupé une moustache qui n’a jamais existé. A partir de ce canular innocent, le monde se dérègle et monte la folie.
« Ayant vidé la poubelle sur le trottoir, il trouva vite le sac qu’on plaçait dans la salle de bains, en retira des cotons-tiges, un vieux tube de dentifrice, un autre de tonique pour la peau, des lames de rasoir usagées. Et les poils étaient là. Pas tout à fait comme il l’avait espéré : nombreux, mais dispersés, alors qu’il imaginait une touffe bien compacte, quelque chose comme une moustache tenant toute seule. Il en ramassa le plus possible, qu’il recueillit dans le creux de sa main, puis remonta. Il entra sans bruit dans la chambre, la main tendue en coupelle devant lui et, s’asseyant sur le lit à côté d’Agnès apparemment endormie, alluma la lampe de chevet. Elle gémit doucement puis, comme il lui secouait l’épaule, cligna des yeux, grimaça en voyant la main ouverte devant son visage.
–Et ça, dit-il rudement, qu’est-ce que c’est ? »
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Traductions
Brésil : Rocco Espaco e Tempo
Corée : The Open Books
Danemark : Forlaget Klim
Finlande : Oy Like Kustannus
Grèce : Selas
Hongrie : Szephalom Könyvmuhel
Italie : Theoria
Japon : Kawade Shobo Shinsha
Pays-Bas : Arbeiderspers
Russie : Zakharov
Suède : Alfabeta
USA : Mc Millan
La presse
Sobrement, l’auteur avance ses pions tout en refusant d’entrer dans la psychologie des uns ou des autres. D’une écriture lisse, pointilleuse, Carrère s’enfonce dans la démence. Il découpe, au scalpel, une folie quotidienne, apparemment bénigne, et qui ne peut s’achever que dans l’horreur.
Les Nouvelles Littéraires
Frissonner au seul souvenir d’une lecture, être pris de malaise, de vertige devant les pages d’un livre, est le privilège rare que peu de romanciers peuvent offrir.
Télérama, 2 avril 1986
Voici un roman où rien ne semble d’abord se passer, à moins de considérer comme notables les gestes machinaux d’un cadre qui vient de se raser dans son bain et qui sirote son premier whisky de la soirée. Pourtant, cent quatre-vingt-dix pages plus loin, on sort de là l’estomac révulsé, la gorge nouée, après un voyage hallucinant et terrifiant dans un enfer que l’on sent là, tout proche, à portée de main, en soi. […] Roman d’une quête, ou d’une perte de l’identité – notre personnage a-t-il jamais arboré la moustache-symbole qu’il prétend avoir rasé ? –, le livre d’Emmanuel Carrère nous entraîne au plus loin, là même où il n’y a plus de retour possible.
Jean-Claude Lebrun, Révolution, 25 juillet 1986