— Paul Otchakovsky-Laurens

Ce pays du silence

Charles Juliet

Ce volume reprend trois recueils autrefois publiés aux éditions Fata Morgana et aujourd’hui épuisés.
Poèmes d’amour, Quête de l’authentique, Recherche de la vérité : ces textes sont tous animés d’un même mouvement qui tend l’être tout entier vers un accomplissement parfois entrevu, parfois inimaginable. Espoir et ferveur : en mots simples, martelés sur des rythmes puissants, c’est un itinéraire fait d’exigence et de pureté qui se dessine, s’amplifie, et emporte.


 

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La presse

Pour l’auteur, la vraie faim ne peut se satisfaire d’un assouvissement banal, au contraire : le poète s’en nourrit pour détruire tout ce qui l’empêche de communier avec le réel. On entend là les échos du « Bateau ivre » de Rimbaud et l’aphorisme splendide de René Char : « Le poème est l’amour réalisé du désir demeuré désir ».


« L’inexorable », c’est l’exigence de la lucidité qui, cependant, peut se révéler mortelle. Chez l’artiste, au contraire, loin de couper du monde elle réconcilie avec lui : à condition de traverser l’épreuve qui en est le prix. Quant au « Pays du silence », il est cette patrie désormais inaccessible de l’enfant au creux de sa mère, mais aussi de cet enfant maudit éjecté d’une matrice déchirée. A défaut de réintégrer ce « Pays du silence » le poète s’efforce d’habiter son propre centre où il tente de réaliser la synthèse du dehors et du dedans : c’est là que se réconcilient la naissance charnelle et la naissance spirituelle, l’exil et le consentement, le deuil et la joie. Comment ? Avec « ces mots que j’enfante - et qui me donnent le jour ».


C’est aux limites de l’épuisement, mais aussi dans l’incandescence, que se réalise, pour le poète et l’artiste, ce travail de synthèse. Avec des mots qui, tout à la fois, creusent et comblent. Car la mère c’est aussi la femme, le silence c’est aussi l’amour : c’est la même fécondité où l’on s’enfonce pour se perdre et se trouver dans un seul sang, un seul feu. Dialogue de la vie et de la mort entre l’homme et la femme : question cent fois renaissante et qui, un jour, soudain se tait. Devant ce risque et ce drame trop fréquent le poète veut bâtir et peupler ce « pays du silence où la voix parle ».
Un très beau livre, un très beau Juliet.


Paul Gravillon, Le Progrès, novembre 1992



[...] Créer pour renaître, écrire pour se donner le jour, le miroir des mots et des oeuvres ne réfléchit pas que leurs auteurs. Ainsi dans le recueil de nouvelles au titre éloquent, que Charles Juliet fait paraître aujourd’hui et qu’il présente comme ses premiers balbutiements, découvrons-nous d’autres fêlures que celles de l’écrivain au corps à corps avec lui-même. Cette fille trop laide pour qu’on la fasse danser, ce jeune homme qui donne ses derniers sous à un clochard, ou cet avocat qui soudain prend la route des champs ont la fragilité des êtres qui, par hasard, acceptent de laisser affleurer cette part d’eux-mêmes qui les rend à la fois plus vulnérables et plus forts. Alors, le vernis social des conventions et des apparences se craquelle, révélant des blessures, des douleurs et des richesses insoupçonnées. C’est dans ces instants-là qu’ils sont au plus près de leur vérité, nous dit Juliet : pathétiques et sublimes. Au sens fort du terme : humains.


Michèle Gazier, Télérama, avril 1993

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