— Paul Otchakovsky-Laurens

Décembre m’a ciguë

Édith Azam

La narratrice attend. Elle attend, elle redoute une nouvelle qu’on doit lui annoncer au téléphone. Une mort. Celle d’une grand-mère bien aimée. Elle se souvient, elle évoque des souvenirs d’enfance bien sûr, mais pas seulement. Elle se rappelle les histoires que lui racontait cette grand-mère lorsqu’elle était enfant. Elle se rappelle des moments, des gestes, des paroles, des sentiments. Elle souffre, elle a peur, et puis finalement le téléphone sonne, comme il était prévu.


Chaque phrase de ce texte atteint un degré inouï d’intensité et de douleur, de colère contre l’inéluctable. On se dit que non, cela ne peut durer ainsi,...

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La presse

Édith Azam, Décembre m’a ciguë

Le titre est étrange et deux fois, hivernal. C’est un long poème d’amour, une plante des chemins et des décombres qui monte comme une ombre, comme une plainte, et toxique ; élégie à l’absente. « Je voudrais remonter à la source, remonter vers notre début, et pouvoir tout écrire afin de le vivre à nouveau. (...) Il y a avant tout la musique, celle de ta voix, celle du piano, celle des livres que tu m’a lus, celle de tes silences qui m’ont appris les miens avec tant de justesse. » Elle, qui va partir, qui va tant manquer, elle seule qui fait chavirer le monde entier et harponne le coeur, c’est « Mamie ». « Ma petite Mamie, avec tout cet hiver, surtout ne prends pas froid »... Alors, il y a les livres, et puis l’écriture, dans le coeur des ténèbres, écrire pour exorciser, exorciser la peur, le souvenir, la solitude, la mémoire qui prend feu, la sonnerie du téléphone qui va venir qui ne doit pas qui ne peut pas ne pas ; négocier avec les aiguilles des heures, conjurer la migraine qui zèbre, étreindre son oreiller pour retrouver le goût de la douceur, éteindre la lumière... tel ce poète japonais qui, dans l’ombre d’une maison éclairée par la lune, éteignait sa bougie pour ne pas voir le temps qui se consume... On sait peu de choses de notre auteur, sinon deux mots : une « poétesse sonore ». Rimbaldienne aux poches percées, elle marche sous la lune, « et la lune dans mes yeux me coince les pupilles ». Il n’est qu’à plonger dans ce texte pour être saisi d’emblée par le rythme singulier, original, et l’envie naturelle de le lire à voix haute, pour soi, pour un autre, pour un souvenir partagé, d’égrener ses mots comme on égrène un chapelet, le temps d’une prière qui ne s’arrêterait pas. C’est le long poème d’un amour fou qui ne veut pas mourir et qui brûle de sa lumière.



Corinne Amar, Fondation La Poste, 19 mar 2013

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Édith Azam, Décembre m’a ciguë, Édith Azam lit deux pages de Décembre m'a ciguë - février 2013