C’est un village du sud de la France, mais ce pourrait être n’importe quel village français. Une lutte mordante s’envenime au sein du conseil municipal entre le maire sortant, notaire de la contrée, et la directrice de l’école primaire, Denise Amouroux. La campagne électorale est vite débordée par les rumeurs, les préjugés et les crispations venus de tout le pays, dans une surenchère d’intimidations et de violences.
Une campagne est une chronique romanesque, étonnamment précise, de l’amour, de l’attachement, comme des haines et des illusions qui traversent les territoires, les coeurs, les mémoires. Et qui font un village français...
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C’est un village du sud de la France, mais ce pourrait être n’importe quel village français. Une lutte mordante s’envenime au sein du conseil municipal entre le maire sortant, notaire de la contrée, et la directrice de l’école primaire, Denise Amouroux. La campagne électorale est vite débordée par les rumeurs, les préjugés et les crispations venus de tout le pays, dans une surenchère d’intimidations et de violences.
Une campagne est une chronique romanesque, étonnamment précise, de l’amour, de l’attachement, comme des haines et des illusions qui traversent les territoires, les coeurs, les mémoires. Et qui font un village français aujourd’hui.
La satire politique révèle l’interchangeabilité des discours et l’hypocrisie des comportements policés. Utilisant plutôt le non-dit que la dénonciation, le roman de Frédéric Valabrègue démarque la parole commune pour en surprendre les paresses et les intérêts cachés. La satire ne juge ni ne condamne, elle met l’accent sur la comédie des ignorances et des impuissances, occasionnant la drôlerie et le sourire navré.
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Frédéric Valabrègue Un chromo et le reste
S’il écrit beaucoup, ses romans sont rares : quatre depuis la Ville sans nom, en 1989. Les textes consacrés à l’art occupent le premier rang chez cet enseignant aux Beaux-Arts de Marseille. On pourrait le déplorer, tant chacune de ses productions littéraires apporte sur les êtres et les choses, in fine sur la marche du monde, un éclairage pénétrant. La chronique romanesque qu’il propose en cette rentrée s’inscrit dans ce lignage.
Ainsi qu’à l’accoutumée le récit se déroule dans le sud de la France. Frédéric Valabrègue en apprécie trop la parlure pour chercher un autre territoire de fiction. Un village, dont il accentue jusqu’à l’excès le côté typique, avec fontaine, companile et micocoulier, vit les derniers jours d’une campagne municipale. Des citadins, qui croyaient aux vertus de son cadre pour quelque activité créatrice ou intellectuelle ("comme si la question du lieu avait la moindre importance"), s’y sont installés. Mais, "venus chercher le silence (...) ils ont trouvé la solitude". Après l’exorde de facture pagnolesque, un désenchantement est déjà à l’oeuvre, qui tout du long ne se démentira pas. Le chromo provençal cède alors le pas à un tableau autrement mordant, de plus vaste portée : le propos de l’auteur n’est pas d’évoquer les bisbilles d’un Clochermerle du Midi. Car l’élection laisse venir au jour des tensions et des crispations occultées par le localisme et l’idylle agreste. Ce qui traverse le pays, haines, exclusions, violences, sexisme, rencontre soudain une inattendue résonance. Entre le maire sortant, notaire de son état, et son adversaire, directrice de l’école primaire, qui chaque jour se rencontrent, échangent, se tutoient, l’on voit comment tout cela vient cristalliser au quotidien.
Une intelligence dialectique impulse cette fiction, ne démontrant, ni ne dénonçant rien, mais montrant et dévoilant. Valabrègue n’a pas opté pour la position commode du surplomb, mais pour l’observation précise des actes et l’écoute des paroles, de leurs approximations, de leurs arrangements avec la réalité et leurs non-dits... L’élection avait eu lieu, "le lendemain, le village avait tourné la page". Tout ce qui avait surgi retrouvait sa place, dans le fin fond du refoulé commun. Ce roman de la désillusion, souvent ironique, recèle une évidente dimension politique. Loin de toute théorie, attaché à l’épaisseur des êtresil suggère avec une réussite certaine les difficultés d’une cohérence dans le brouillage ambiant.
Jean-Claude Lebrun, l’Humanité, octobre 2018