Si seulement la nuit
Correspondance
Alice & Atiq Rahimi
Confinés séparément, le père et la fille ont entretenu un échange épistolaire en 2020 pour s’encourager, raconter à l’autre son quotidien et se donner des nouvelles rassurantes. Mais très vite leur correspondance, émouvante et inquiète, s’assombrit, vire à l’écriture tourmentée de soi, et s’engage dans le récit d’une famille bouleversée par la politique, l’exil et l’art.
Le père, écrivain et cinéaste d’origine afghane, est incapable d’écrire un mot de fiction, de reprendre l’écriture de son roman. Il se croit alors enfermé dans un monde virtuel. Sa fille,...
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Confinés séparément, le père et la fille ont entretenu un échange épistolaire en 2020 pour s’encourager, raconter à l’autre son quotidien et se donner des nouvelles rassurantes. Mais très vite leur correspondance, émouvante et inquiète, s’assombrit, vire à l’écriture tourmentée de soi, et s’engage dans le récit d’une famille bouleversée par la politique, l’exil et l’art.
Le père, écrivain et cinéaste d’origine afghane, est incapable d’écrire un mot de fiction, de reprendre l’écriture de son roman. Il se croit alors enfermé dans un monde virtuel. Sa fille, née en France de parents exilés, étudiante en art dramatique, s’interroge sur son identité réelle. Ce sont ses mots et ses interrogations, à elle, qui ramène son père à la réalité du monde actuel, et à la réminiscence de son passé douloureux, volatile. Le passé ressurgit entre eux comme un fantôme encombrant, et que le père et la fille ont bien du mal à partager. Alors que les nouvelles de l’Afghanistan sont chaque jour de plus en plus angoissantes, le père parvient à raconter ce qu’il n’avait jamais dit à sa fille : la fuite de Kaboul, l’invraisemblable périple jusqu’au Pakistan, la famille, les amis abandonnés ou disparus.
Ainsi deux générations, en s’écrivant, racontent le monde, la vie et les sentiments d’une famille exilée. Le père vit dans la nostalgie et l’inquiétude des événements, la fille s’interroge sur son identité et veut croire en l’avenir. Une transmis-sion est-elle encore possible ? Et derrière les mots échangés, qui se révèle ? Et qui se cache toujours ?
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La presse
Coup de coeur
Une complicité artistique lie l’écrivain et réalisateur franco-afghan Atiq Rahimi et sa fille, Alice, 25 ans, née en France. Diplômée du Conservatoire de Paris, elle est comédienne.
Si seulement la nuit reproduit leur correspondance par mail, commencée à la faveur du premier confinement en mars 2020 et achevée en décembre 2021. L’immobilisation entre quatre murs et le gel des projets professionnels font naître chez eux une réflexion intime : chacun se demande qui il est, et ce qu’il fait de ses héritages intellectuel et éthique. Cette conversation intergénérationnelle, un brin compassée dans ses premières pages, devient très intéressante au fur et à mesure que les souvenirs de l’écrivain se déroulent. Avec tact, douceur et mélancolie, Atiq Rahimi, récompensé du prix Goncourt pour Syngué sabour, rappelle les valeurs fortes, le milieu et l’histoire chaotique qui l’ont forgé. Ils l’ont incité à chercher la liberté, quitte à errer. Son père, monarchiste et gouverneur du Panchir, fut mis derrière les barreaux après le coup d’Etat de 1973, qui fit de l’Afghanistan une république. Â Alice qu’il appelle « ma vie », Rahimi raconte son amour de la France et son attachement au monde perse. II se réjouit que la génération de sa fille ait rompu avec « la fierté patriarcale », chère à la culture afghane. Lui reviennent en mémoire des anecdotes et des légendes délicieuses, comme celle-là : un roi demande à un artiste une oeuvre d’art capable de le rendre triste quand il est content et heureux quand il est dans la peine. L’artiste fabrique une bague sur laquelle il grave cette phrase : « Tout finit par passer.»
Virginie Bloch-Lainé, Lettres Persanes, mars 2022