— Paul Otchakovsky-Laurens

Michael Jackson

Pierric Bailly

Cela se passe à Montpellier et met en scène une bande d’amis, certains étudiants, d’autres non, qui semblent passer plus de temps à boire et à faire la fête qu’à suivre leurs cours ou à chercher du travail. Et les fêtes, et les beuveries, nombreuses, sont autant d’occasion d’essayer d’attraper, chacun pour soi au départ, ce qu’on est, ce qu’on veut. Recherche désordonnée d’une originalité à tout prix, histoires d’amour croisées, échanges, interrogations, mais refus de penser à l’avenir.

Ici la phrase épouse à la perfection – avec ses ruptures ses...

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La presse

En 2008, dans Polichinelle, son premier roman, le narrateur de Pierric Bailly s’appelait Lionel et passait l’été dans son village du Jura à suivre sa petite sœur et sa bande d’ados un peu cramés. Entre l’Abribus, la fontaine et le Shopi, Lionel, 21 ans, regrettait cet âge encore gracieux où l’on n’a pas besoin d’« avoir l’air », et l’auteur réussissait à transcrire le rap poétique et fiévreux accompagnant les virées en scooter et les pique-niques alcoolisés. Dans Michael Jackson, Lionel est en quelque sorte devenu Luc, étudiant à Montpellier en arts du spectacle, annonçant, pour rassurer ses parents, qu’il veut devenir producteur exécutif de cinéma et surtout pas metteur en scène.

Pour un Jurassien, Montpellier propose une esthétique qui « ne donne pas envie de souffrir, ni même de travailler ». Alors, entre 18 et 26 ans, Luc va s’employer à faire autre chose. Prendre un studio et y accrocher un poster de son héros, le cycliste Richard Virenque. Fréquenter Élodie qui aime un peu trop la chanson française. Passer du temps au comptoir du bar le John Wayne, à boire des bières avec n’importe qui. Rencontrer Maud, en master de psychologie, qui n’a jamais entendu parler d’Iggy Pop. Découvrir le corps tatoué de la jeune fille et la quitter le moins possible. Se faire des amis qui deviennent des professionnels du film porno. Sentir que l’adolescence est bel et bien finie, que les années de fac sont en train de filer et, à 26 ans, se retrouver en couple dans un restaurant gastronomique pour fêter son anniversaire.

Pierric Bailly décrit admirablement ces années entre parenthèses, ce cocon où l’on se construit, s’immobilise, s’active à ne rien faire, à projeter beaucoup, s’ennuyer un peu et changer d’avis souvent. L’auteur accompagne, étudie, décrypte, Luc et Maud à 18, 22 et 26 ans comme trois couples distincts sur trois rythmes différents. Polichinelle réinventait un langage, Michael Jackson affine le propos : le romancier joue sur les tempos, ralentit puis part en vrille, fait rire par des images incongrues, des rapprochements inédits, des analyses sociales sur le vif, des scènes d’anthologie. Il parle aussi d’amour et d’utopie, sentimental un matin et carnassier le soir. En jouant toujours juste, Pierric Bailly confirme un talent singulier, ludique et protéiforme, pour dire la vie qui passe, même lorsqu’on évite de penser au lendemain.


Christine Ferniot, Télérama, janvier 2011



Michael Jackson, le retour de Pierric Bailly


Dans un style remarquable, Pierric Bailly brosse le portrait d’un jeune homme et excelle à décrire le monde de l’adolescence.


Ce n’est pas un secret, Polichinelle (P.O.L 2008, repris en Folio) a imposé d’emblée une voix marquante de la littérature française d’aujourd’hui. Celle de Pierric Bailly, qui nous projetait dans la tête d’un jeune homme de vingt et un ans déjà inconsolable de son adolescence. Le dénommé Lionel Elpich qui habitait à Clairvaux-les-Lacs et proclamait : « Je ne me suis pas suicidé à dix-sept ans. Je n’ai plus le choix, il faut que je devienne une légende, un mythe, c’est la solution. »

Bailly, qui opère un retour tonitruant avec Michael Jackson, a lui aussi vu le jour dans le Jura en 1982 et grandi dans un petit village de vingt habitants, non loin de Clairvaux-les-Lacs. Après sa scolarité à Lons-le-Saunier, le voici à Montpellier. Étudiant en arts du spectacle à l’université Paul-Valéry, à l’instar de Luc, le protagoniste de Michael Jackson. Rentré dans le Jura, il a commencé à écrire Polichinelle tout en travaillant en intérim (en usine, dans la grande distribution ou dans le bâtiment). Son singulier premier roman a emballé la presse, les libraires et les lecteurs. Bailly planche actuellement au scénario de l’adaptation pour le cinéma qui est en cours de production.

Du mystère, de l’humour et un regard analytique sur l’époque


Il vient surtout d’accoucher d’un nouveau livre, encore plus époustouflant que le précédent, dont certains passages correspondent à des notes prises durant ses années à Montpellier. Luc, son héros et narrateur, a dix-huit ans et une tignasse de cheveux crépus au moment où il débarque étudier en Languedoc-Roussillon. Luc, qui a grandi dans un monde « sans piscine dans le jardin, sans mère en tailleur ni père en cravate au petit déjeuner », aspire à devenir « producteur exécutif de cinéma ». Comme il l’explique dans un bistrot à une grosse dame à chien qui lui paye des demis de bière australienne.

Ce garçon timide au tempérament calme a emménagé dans un studio cours Gambetta, de la fenêtre duquel il regarde les passantes. Au mur de sa chambre, il a punaisé une photo du cycliste Richard Virenque en plein effort. Et aussi la lettre que sa sœur lui a remise la veille de son départ, qu’il ne tardera pas d’ailleurs à retirer.

Luc ne met pas longtemps à faire des rencontres. Élodie a une silhouette longiligne et un pantalon sans poche arrière. La pétillante et turbulente Maud, elle, est inscrite en première année de master de psychologie. Voilà le genre de fille capable de mettre le feu au rideau de sa cuisine en se faisant une omelette. Maud a beau avoir un tatouage sur le sein, elle n’a jamais entendu parler d’Iggy Pop et n’a jamais acheté de magazine de sa vie, « pas même un truc de jeux fléchés ou de mode pour la plage » !

Dans les parages, on croisera encore les dénommés Martin, Léonard et Eglantine, Phil et Suzy. Ou Ronan et Claire qui sont sur le point d’entamer une belle carrière dans le porno amateur… Pierric Bailly cadre serré un personnage qui traîne dans les sex-shops, au casino, ou dans des fêtes d’anniversaire qui finissent en orgie. Mais Luc n’est pas seulement un petit dilettante qui perd son temps à bavasser avec ses copains : tous les jeudis, il emmène également son voisin du dessus en courses au Shopi.

Le lecteur avance hypnotisé dans un roman d’apprentissage, à la fois éternel et totalement moderne, où l’on suit pas à pas l’évolution et les interrogations de Luc. Pierric Bailly reconnaît que la structure du livre a été difficile à élaborer. Qu’il voulait « obtenir quelque chose de sophistiqué tout en donnant une sensation de progression linéaire, que les transitions d’une partie à l’autre ne soient pas trop heurtées, et que cela crée un trouble tout à la fois stimulant et intriguant ».

Le pari est réussi puisque l’écrivain arrive parfaitement à restituer le tempo si particulier des années étudiantes, sorte de monde clos avec son mélange de tension et d’immobilisme. Il y a du Bret Easton Ellis chez un Bailly qui utilise à bon escient la précision des détails et la manière d’aborder une certaine forme d’ennui. Du David Lynch dans l’art de lancer de fausses pistes, de jouer du mystère. Du Michel Houellebecq aussi pour l’humour en creux, le regard analytique sur la sexualité et l’époque. Au-delà de cette parenté nullement écrasante, Pierric Bailly montre encore une fois qu’il possède surtout une écriture et un ton absolument uniques dans le paysage littéraire français actuel.


Alexandre Fillon, L’Express, janvier 2011



Une jeunesse contre la montre


Brillante chronique estudiantine, Michael Jackson ne dit rien du chanteur – mais tout du temps qui court. Une intense méditation sur le passage à l’âge adulte et la création.


Attention, faux-semblant : dans Michael Jackson, il est moins question de l’interprète de Billie Jean que d’un cycliste français, bouc émissaire des Guignols de l’info. « Dans certains milieux, […] on n’évoque jamais Richard Virenque sans y associer un rire comprimé ou une tentative de blague autour de ses maladresses syntaxiques et de sa voix d’ornithorynque. On ne salue pas ses performances sportives au premier degré, comme on le fait pour un champion mieux né et qui pratique le tennis ou l’équitation. Le cyclisme est un sport mineur, Richard Virenque un athlète de variété » – comme on le dit d’un chanteur…

Ce n’est pas la seule étrangeté du second roman – puissant – du jeune Jurassien Pierric Bailly (déjà remarqué avec le formidable Polichinelle). Si Michael Jackson s’intitule ainsi, c’est que le génie de Thriller est né le même jour que le père du narrateur, et que ses obsèques se sont déroulées lors de la quatrième étape du Tour de France 2009 – un contre-la-montre par équipes, du côté de Montpellier.

Pierric Bailly impose ici une rare puissance d’écriture


C’est dans la cité chère à feu Georges Frêche que Luc, baccalauréat en poche, atterrit quelques années plus tôt pour s’inscrire en arts du spectacle à l’université Paul-Valéry. S’il rêve de devenir cinéaste, ce garçon de 18 ans, tout juste débarqué de son Jura natal, passe moins de temps dans les amphis qu’au comptoir du John Wayne, saloon où il fait la connaissance d’un sosie de l’acteur Christopher Walken. Luc y croise aussi plein de « collègues » de son âge, dont Maud, dont il tombe immédiatement amoureux. Le genre de fille qui « allume ses cigarettes au Zippo, porte une veste de cuir » et qui « exècre Jean Rochefort, les cactus et le pain grillé ». Leurs amis se prénomment Leonard, Suzy, Erwan, Eglantine, J.-P. ou Martin. Il y a surtout Ronan et Claire (dite Miss L’Éclair), gentil couple qui va se lancer dans le porno. Une de leurs productions révolutionnera le genre : La Femme gruyère. Soit « les péripéties d’une jeune paysanne dont le corps est parsemé de vagins secrets ». Luc n’en oublie pas pour autant sa famille, donc sa petite sœur, qu’il chérit plus que tout, et ses parents, dont il n’arrive décidément pas à comprendre le mode de vie « eux qui, dans les années 1990, s’étaient abonnés au “Club Dial” pour retrouver en compact disc les plus grands succès de leurs chanteurs à veste en jean préférés – Henri Tachan, Leny Escudero, François Béranger »…

Pourtant, un doute persiste durant la lecture de cet insaisissable Michael Jackson : parle-t-on toujours du même Luc et de la même Maud, selon les chapitres ? Ne ferait-on pas face à des avatars, des mutants ?

Loin d’un énième décalque français de Bret Easton Ellis, Pierric Bailly impose ici une rare puissance d’écriture et prend le temps d’installer ses scènes, jusque dans le moindre détail, pour mieux prendre une direction inattendue ou stopper l’action au moment où on ne l’attend pas. Derrière sa façade de chronique estudiantine et sexuelle, Michael Jackson se révèle un roman d’une grande ambition, qui dépasse les contingences générationnelles pour s’interroger sur l’identité, les méandres de la création et le passage à l’âge adulte. Ce n’est pas un hasard si l’épilogue se clôt ainsi : « Le temps passe, je n’ai pas l’impression de me rapprocher de la fin. On dirait même que ça vient de commencer. » Après tout, Marcel Proust ne dit-il pas la même chose que « Bambi » Jackson dans Remember the Time ? Ou Richard Virenque, lorsqu’il se remémore son ascension victorieuse du mont Ventoux…


Baptiste Liger, L’Express, 11 janvier 2011



Avertissement aux vieux fans les plus atteints de Michael : n’achetez pas ce livre, il ne parle jamais de Michael Jackson ! Avertissement aux jeunes fans les plus exigeants de beaux romans (si ça existe) : achetez ce livre, il parle de vous.



Dans Michael Jackson, Pierric Bailly (28 ans) remanie à sa manière toute personnelle l’idée de la série Friends, la repulpant et la pervertissant grâce à une dimension érotico-existentielle rarement vue dans une histoire postado. On lit les aventures estudiantines de Luc, Maud et leurs potes à Montpellier sans se rendre compte qu’on est au centre d’un trafic sentimental qui, en ligne d’horizon, fait le portrait d’une génération particulièrement portée sur la chose sexuelle. Exposés depuis leur plus jeune âge au flux porno d’Internet, les personnages de ce roman d’initiation ont des rêves, sinon inattendus, vaguement surprenants.

Ceux-là veulent devenir stars du X, ceux-ci ne voient pas de mal à partouzer et ainsi de suite dans un décor où – quand même ! – on tente de comprendre à quoi rime une histoire d’amour. Pierre Bailly, qui en est à son deuxième roman, affiche un beau style qui coule sans accroc et porte en apesanteur. Un livre intitulé Michael Jackson où il n’est (presque) jamais question de Michael Jackson. Oui, d’accord, mais pour le coup, ça valait vraiment la peine de ne pas en entendre parler.


S.M., Télémoustique, 17 février 2011




Une jeunesse


Un lecteur pressé qui se fierait au titre de ce roman se fourvoierait inévitablement. Les amateurs du chanteur à transformation seront déçus ; ceux qui ne le supporteraient pas, ou plus, aussi. Il n’est que rarement question de lui dans ce roman. Encore que.


Michael Jackson est l’interprète d’une chanson, Thriller, dont le thème est proche de celui du roman  : la métamorphose. Le chanteur, dans le clip fameux réalisé par John Landis s’y transforme en loup-garou sur une musique et avec une chorégraphie qu’on a du mal à oublier. Luc et Maud, le héros de ce deuxième roman de Pierric Bailly, après Polichinelle, se transformant eux aussi, même si les changements qui s’opèrent ne sont pas bien visibles ou lisibles. Entre les trois Luc qui racontent, et les trois Maud que l’on voit à quelques années d’écart, des modifications se sont produites et elles ne sont pas toutes le produit du vieillissement. Autour d’eux, tout bouge beaucoup et on pourrait s’y perdre. Ronan et Claire, Walken, Martin, Léonard… toute une bande d’amis ou de relations se croisent et se rencontrent à Montpellier et dans ses environs, cadre principal du roman. Luc, le narrateur, parle au présent et un grand nombre d’actions brèves traduisent cette sensation de bousculade des faits, des impressions qui les accompagnent, des sentiments qui se greffent autour.

Le plus simple, pour commencer, est de dire que Michael Jackson raconte l’amour entre Luc et Maud, une sorte d’amour fidèle et romantique, dans des circonstances qui ne le sont pas, et parmi des jeunes qui songent d’abord à passer le temps et à jouir de la vie. Non que Luc et Maud soient dans une logique tout autre, mais ce qu’ils vivent semble un peu à l’écart, leur permet de se singulariser. Tous deux se transforment au fil du roman, ou plutôt semblent vus d’un autre angle à chaque fois, dans une autre dimension. La permanence serait plutôt du côté de Claire et Ronan, couple «moderne », sans état d’âme. Claire est très heureuse, voire fière de travailler dans le cinéma porno dont son compagnon et elle font une sorte d’éloge pépère. Ils gagnent leur vie en tournant dans des films et la gagnent plutôt bien. Leurs amis se débrouillent, comme on le fait aujourd’hui. L’université où Luc étudie les arts du spectacle est plus un refuge en attendant, que le lieu dans lequel on construit quelque chose, on manifeste de la curiosité ou de l’envie. Les lieux qui comptent sont ceux de la ville, et en particulier un bar appelé le John Wayne où la plupart des personnages se retrouvent. Quelques discothèques, des plages sont les autres lieux de rencontres entre des sortes de Vitelloni d’aujourd’hui.


S’il est une première qualité qu’on peut reconnaître au roman de Pierric Bailly, c’est ce regard sur la jeunesse (à laquelle il appartient). On est loin de la sociologie des conflits entre générations (les adultes apparaissent peu, sinon à travers les parents de Luc, et Charles, le voisin dont il s’occupe), du politique ou de la morale. Il y a dans ce roman, et ce n’est pas un mince compliment à lui faire, quelque chose du regard que posait Jacques Rozier sur ses jeunes contemporains dans Adieu Philippine. Même désinvolture (apparente), même goût de la digression, même insignifiance de façade qui cache un vrai propos. On songe aussi à Milos Forman pour ses premiers films tchécoslovaques, comme L’As de pique ou Les Amours d’une blonde . Ces références ne viennent pas au hasard : Bailly écrit un peu en cinéaste, donnant beaucoup à voir, et à entendre. Et son humour, entre ironie douce et causticité, ressemble à celui du cinéaste né en Bohème. Ses phrases semblent s’enchaîner par coq-à-l’âne. Les liens ne sont pas toujours visibles. La parataxe ou les liaisons logiques arbitraires donnent le sentiment que tout se vaut. C’est bien l’un des maux de ce monde et on devine dans l’écriture de Bailly une visée morale, ce qui ne veut pas dire moralisatrice. Jamais le narrateur (ou l’auteur) ne se prend au sérieux et fait la leçon. Il montre, il donne à entendre ou il fait lire. Parmi les morceaux de bravoure du roman, des passages qui feront rire, il y a un « sample » mêlant des titres de films pornos et des morceaux de chansons populaires. Le scénario de La Femme gruyère n’est pas non plus piqués des hannetons. Mais le comique tient aussi aux dialogues à la fois très pensés et très naturels, comme pris sur le vif. Bailly rend une forme de spontanéité qui est celle de cette jeunesse d’aujourd’hui. Les codes ont changé, les limites ne sont plus placées comme avant parce que bien des illusions se sont effondrées.

Doit-on y voir un symbole ? Mais parmi, les héros de Luc, dont les portraits figurent dans la chambre, il y a Richard Virenque, avec Martin Sheen, héros pour d’autres raisons, il incarne l’effort, la tension extrême jusqu’au bord de la rupture. Le coureur cycliste est solitaire, il affronte les éléments, il a tout l’air d’un héros. Mais on sait quelles substances Virenque absorba pour devenir ce héros, « à l’insu de son plein gré ». Afficher ce coureur cycliste ou songer à Martin Sheen, autre héros de l’épuisement, c’est se donner des modèles qui servent d’artifice. De même pour Michael Jackson dont le corps, et le visage en particulier, n’avaient plus rien de naturel. Bailly décrit un monde d’apparences : apparences dans la parole, apparences dans les actes pris par une caméra (celle de Dave Dave, cinéaste porno ou artiste conceptuel on n’en sait rien), apparences vestimentaires (les accessoires, les vêtements sont les signes d’un monde), rien n’a de vraie consistance. Les gestes eux-mêmes, tous ce qui touche au sexe, est démonétisé, indifférent. On en parle beaucoup, on le fait sans se poser de questions, sans souci d’un avenir. Devant le maire, Phil dit non à Suzy, pour s’enfuir avec Coralie. Rien de solide donc.

Si ce n’est le Jura. C’était la région évoquée par Polichinelle, c’est ici le contraire de Montpellier, à tous égards. Là vit la famille de Luc, et sa sœur en particulier. Ses parents croient encore en des luttes, en un engagement à gauche. Lui y retourne de temps à autre, parade dans son village comme le roi du pétrole et se rappelle les soirées télé à voter pour les Césars. Cet autre monde est derrière lui, avant la métamorphose, avant la rencontre avec Maud. C’est une autre France, avec sa jeunesse aussi, si peu entrée dans le monde moderne qu’on y croirait à peine. Comme si le Jura ressemblait à Mouthe, village le plus glacial de France : une Sibérie lointaine, oubliée de tous.


Avec son air de ne pas y toucher, Pierric Bailly fait avancer les choses. Il raconte et décrit une jeunesse que nous côtoyons, dont nous ne saisissons pas toujours les comportements, qui semble ne pas avoir les valeurs qui nous furent communes. Il ne se prend pas au sérieux ; il est désinvolte mais méfions-nous de cette légèreté, ou au contraire encourageons-la : mine de rien, elle est plutôt subversive.


Norbert Czarny, La Quinzaine littéraire, mars 2011

Agenda

Du jeudi 13 juin au dimanche 16 juin
Pierric Bailly au festival Le murmure du monde

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Pierric Bailly, Michael Jackson, Michael Jackson (1)

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Son

Pierric Bailly, Michael Jackson , Michael Jackson - Entretien avec Alain Veinstein - Du Jour au lendemain - France Culture - 22 mars 2011