— Paul Otchakovsky-Laurens

Massacre à l’art contemporain

Raphaël Majan

Sa belle subordonnée guadeloupéenne n’en finit pas d’agacer Wallance. Voici que Nathalie Malicorne a un nouvel amant qui n’est toujours pas le commissaire mais un sculpteur ou on ne sait quoi qui serait un génie, et pas qu’au lit. Son vernissage n’ayant rien pour mettre de joyeuse humeur, il faudrait un miracle pour que l’artiste soit toujours contemporain à la fin de la soirée. L’auteur d’une œuvre engagée devrait au demeurant se réjouir d’avoir un spectateur engagé. Car, de même qu’il n’est pas indifférent à Proust et Bach, Wallance, si cultivé, ne restera pas inerte face au travail de Jim Z. Losange.

 

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La presse

Flic ou voyou&nbsp?


Qui est le commissaire Wallance ? Un flic discret et indépendant, un justicier, un moraliste ou un tueur maniaque ? Cinquante ans, aucun ami, peu apprécié de ses collègues mais respecté par sa hiérarchie, Wallance est un assassin méticuleux qui tue comme on fait le ménage, par goût de l’ordre. Après avoir commis ses crimes, Wallance continue son œuvre de salubrité publique en arrêtant n’importe quel péquin : « Si après chaque meurtre, on arrêtait immédiatement le premier ou le deuxième venu, dit-il, il n’y aurait plus de crime impuni et la police gagnerait un temps fou. » Logique et imparable. Le père de ce nouveau héros des temps modernes s’appelle Raphaël Majan. Ses deux premiers manuscrits, envoyés par la Poste, sont publiés chez l’éditeur de René Belletto, P.O.L. Sans jouer au jeu des ressemblances, on sent chez ce jeune romancier une distance, un goût très particulier du syllogisme, un humour citronné qui le rend un peu cousin de l’auteur de La Machine et du Revenant. Majan s’amuse avec les codes du polar, les poussant à l’extrême pour mieux les détourner. Son héros est un serial killer de la pire espèce, froid, efficace et intelligent. Pire encore, il est cultivé. Son créateur aussi. Quelle jubilation !


Christine Ferniot, (sur L’Apprentissage de Raphael Majan), Lire, mai 2004