— Paul Otchakovsky-Laurens

Lazy Suzie

Suzanne Doppelt

Lazy Suzie tourne autour des anamorphoses, ces tableaux à secret, à double lecture, « la magie artificielle des effets merveilleux », disait Baltrusaitis. Il joue également avec la construction perspectiviste puisque les anamorphoses en sont « une belle et secrète partie ».
Pour une part, c’est un prolongement du précédent livre, Le pré est vénéneux, qui traitait déjà des images fantômes, de ce que l’on croit voir et de ce dont il faut douter toujours un peu.
Lazy Suzie parle de peinture, de ces images qui, pour être construites, sont projetées dans un espace confiné, la camera oscura qui est...

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Traductions

USA : Litmus Press

La presse

Le monde servi sur un plateau tournant


Suzanne Doppelt explore les modes d’existence du réel saisi comme effet de réglage d’un appareil photographique ou poétique. Derrière la gravité de l’enjeu, le jeu drôle et pensif d’un texte inspiré.


Dire la beauté du monde est une des tâches les plus anciennes parmi celles que se sont données les poètes. Certains l’expriment sur le mode de l’exaltation lyrique, d’autres, de Lucrèce à Queneau, sur celui de l’exploration raisonnée. Suzanne Doppelt pourrait être rangée parmi ces derniers, n’était la sensation, insistante, de la présence de l’auteur dans cet acte de contemplation, d’émerveillement et d’écriture. « Je me reflète et me répercute. » Ce pourrait être une manière de définir son rapport à la réalité, cette façon de dire « la réalité est peut-être un rapport ». Pour Suzanne Doppelt, le monde s’offre comme un pré. Un pré à parcourir, « vénéneux ». Ainsi s’intitulait un de ses précédents livres, citant Apollinaire, qui ajoutait ?&nsbp;: « mais joli ». Un pré où la beauté qui se cueille sans précaution peut empoisonner. Un pré, aussi, qui se fabrique, où la frontière entre le réel et le langage s’abolit, où l’objet représenté est le mode de représentation. Ainsi peut se comprendre le motif récurrent du cercle. Objectif photographique ou miroir, qui copie et inverse le réel. « La réalité n’est qu’une affaire de réglage, le passage réduit d’un monde, une gigantesque peinture, à un autre, par simple rotation. » « Le monde est beau, il est rond », écrivait Suzanne Doppelt, en titrant un autre de ses livres. Rotondité du monde et du dispositif qui le saisit, il, lentille ou miroir, mais aussi de celui qui le présente. Une Lazy Suzie, une paresseuse Suzanne, est un plateau tournant où dans les restaurants chinois sont présentés les plats dont chaque convive se sert. Mais c’est aussi la chaste Suzanne de la Bible, matée par les vieillards, éternelle allégorie du voyeurisme dans les arts visuels. Lazy Suzie est donc, plus que l’essai que pourrait faire imaginer l’exposé de ses thèmes, un jeu qui se déroule à plusieurs niveaux, « vertige panoramique » lancé comme une toupie par le plaisir de voir, de faire voir et de dire. Suzanne Doppelt poursuit avec ce texte une œuvre ludique, simple et savante, spontanée et terriblement composée, qui en dit peut-être plus sur la poésie, le moi et le monde qu’il n’y paraît.


Alain Nicolas, L’Humanité, 7 janvier 2010


Agenda

Samedi 1er juin
Suzanne Doppelt à la Librairie La Terrasse de Gutenberg

Librairie La Terrasse de Gutenberg
9, rue Emilio Castelar
Paris 75012

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Samedi 8 juin
Frédéric Boyer, Suzanne Doppelt et Christian Prigent à l'auditorium du Pavillon carré de Baudouin

Auditorium du Pavillon carré de Baudouin
121, rue de Menilmontant 
Paris 75020

 

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