— Paul Otchakovsky-Laurens

Les Voleurs d’orgasmes

Hubert Lucot

Poursuivi par des tueurs, un jeune chimiste, s’enfuit vers le Nord de l’Europe où la mystérieuse multinationale qui l’emploie (la Multinana) lui commande des enquêtes révolutionnaires par leur objet comme par les moyens qu’elles mettent en œuvre.
Il rencontre une jeune femme : coup de foudre. Elle disparaît. Il va la rechercher au Maghreb, à Hongkong, au Japon, en Australie, à Rome, au Portugal, au gré de missions au cours desquelles il multiplie les prouesses technologiques, sexuelles, financières, martiales et télévisuelles.
Il en profite pour percer les motivations de ceux au service desquels il risque chaque jour sa vie et son intégrité morale, il en...

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La presse

Les Voleurs d’orgasmes surprendra tous ceux qui suivent l’oeuvre en cours d’Hubert Lucot. Dans ce roman d’aventures policières, sexuelles, boursières et technologiques, rien de « tassé », d’« entassé » ou d’ « irrespirable », nulle surcharge, mais une écriture claire, simple, concise, comme désireuse d’économiser ses moyens.


Ficelé à la manière d’un roman policier, Les Voleurs d’orgasmesmet en scène un certain Luc Bouc (archétype du héros moderne ?), investi d’une mission assez plaisante (retrouver une belle créature), dans le « monde actuel de la mondialisation ». Du Japon au Portugal, du Maghreb à l’Italie, on découvre en effet tout ce qui, à défaut d’une beauté vraiment fatale, fait la richesse de notre quotidien : la loi du marché, le terrorisme, les multinationales, internet... Une richesse sur laquelle plane le regard satirique de Lucot, que l’on sent effrayé par tant de fadeur.


D. G., Le Matricule des Anges, 1998



Avec Les Voleurs d’orgasmes, Hubert Lucot dresse le portrait d’une société cynique et taille une veste à la mondialisation. Le roman jubilatoire d’un éternel flâneur.


Un monde parfait.


Qui a déjà compris quoi que ce soit à James Bond ? Eh bien, le dernier roman d’Hubert Lucot, Le voleur d’orgasmes, a tout d’un James Bond...écrit sous acide. Autant dire que les aventures policières, sexuelles, boursières et technologiques de Luc Bouc (ce nom...) ressemblent à l’imbroglio le plus inextricable.
D’emblée, le voilà poursuivit par des tueurs. Pourquoi ? Mystère. On (qui ? autre mysrère) l’investit d’une mission (secrète, bien sûr) «...dans le monde actuel de la mondialisation », dont il ne sait lui-même en quoi elle consiste vraiment. Armé d’un agenda électronique (dont il ignore l’utilité), il passera ainsi d’un pays à l’autre, d’une limousine à une Rolls, de créatures de rêve en personnages énigmatiques. Juste le temps d’échapper à un attentat, de tomber amoureux, d’assister à un meurtre et à quelques vols d’orgasmes... A en croire le livre d’Hubert Lucot, rien n’est plus simple que de voler un orgasme : il suffit de placer dans le sexe de sa partenaire (si on est un homme), dans le sien (si on est une femme), un fil électrique incolore qui transmettra les vibrations à un central. Bon d’accord, me direz-vous, mais à quoi bon ? Il s’agirait ici d’une stratégie bassement commerciale, afin d’établir « l’étude complète et permanente de nos subjectivités, de nos goûts, réflexions, tendances, penchants et préjugés indéracinables, de façon à nous comprendre et à nous diriger, à nous faire accepter la potion, le spectacle, la « guerre juste » dont nous ne voulons pas. Luc eut soudain une image massive : un million d’acheteurs se précipitent « on ne sait pourquoi » vers un tel boxer-shirt, telle gomina, tel film... » De quoi assurer, par exemple, la fortune d’une multinationale...
Burlesque, absurde, Les Voleurs d’orgasmes fait inévitablement penser à Kafka et au Procès, avec le personnage de Luc bouc dans le personnage de Joseph K. puissance dix mille, pris dans les rouages d’une société tentaculaire où l’humain n’a aucune chance face à « l’Organisation » et au « Programme » - comprenez les multinationales qui mènent le monde. Hubert Lucot paroxyse certains aspects de la vie « postmoderne » (technologie de pointe, transactions boursières, mondialisation... jusqu’au grotesque, afin de dresser le portrait d’une société cynique, avide de pouvoir et de gains. On se demande où il est allé chercher ça...
Si le récit comporte quelques longueurs, et si chercher sans cesse à comprendre qui est qui et qui fait quoi s’avère parfois lassant, on s’aperçoit vite que l’essentiel du roman réside hors l’histoire. Le vrai bonheur qu’on a à lire Le Voleur d’orgasmes tient d’avantage aux remarques loufoques et aux digressions incongrues qui jalonnent le texte, comme autant de « stations » d’une totale gratuité narrative mais jubilatoires de drôlerie. Contre le système de rentabilité et de rendement qu’il décrit, cet éternel flâneur qui consacrait, il y a trois ans, un livre à ses promenades parisiennes (Sur le Motif, P.O.L) privilégie ici le plaisir pur de la narration contre l’efficacité du récit linéaire : et nous rappelle que, contrairement au téléfilm, la littérature digne de ce nom n’est jamais un produit, mais le champ - un des derniers - de toutes les libertés.


Nelly Kaprièlian, Les Inrockuptibles, avril 1998


Et aussi

Hubert Lucot est mort.

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