Vite, parler pour ranimer les choses qui se sont tues. Les choses sur lesquelles on glisse. Ce sont les mêmes choses qui servent tout le temps, pour tout le monde. Comme s’il était de notre devoir de ne manquer aucun de ces rares instants où nous croyons savoir ce dont il faudrait parler ensemble et ce qu‘il faudrait passer sous silence, et comment il conviendrait de s’y prendre. On parlerait alors d’argent facile, des grandes filles qui nous font envie, de sa mère et de ses enfants. On parlerait de tout ce qui nous fait peur. On parlerait pour ne pas mourir tout de suite. Des paroles fantômes entre deux amis, des paroles en l’air comme on dit.
Un monologue qui n’est pas un roman mais un examen de conscience, adressé au meilleur ami dont les interventions sont autant de relances. L’amour, la paternité, la foi, les guerres, « la détresse du monde » face à « des vies comme les nôtres » : un récit contrasté où des mères d’assassin croisent des passagères de trains de banlieue.
Libération, 16 mai 1996.