— Paul Otchakovsky-Laurens

Calme toi, Lison

Jean Frémon

C’est un monologue intérieur, Louise Bourgeois parle, se parle, passe en revue des bribes de sa longue vie, dans le désordre. Tout est ici imaginaire, ce n’est pas une biographie. Mais tout est plausible, les humeurs, les saillies, les ressentiments, les pudeurs. C’est le portrait, de mémoire, d’une femme qui a voué sa vie à son art, une vie qui se confond avec le siècle, et a été reconnue tardivement comme l’une des artistes majeurs de notre temps. C’est drôle, touchant, empathique, respectueux et documenté.


Le livre de jean Frémon est résolument une fiction. Il exprime de l’intérieur à la fois les tensions tragiques confinant à la...

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Traductions

Angleterre : Les Fugitives | Espagne : Elba Editorial | Turquie : Harfa | USA : New Directions

La presse

Une nouvelle fois, Jean Frémon publie un livre qui est une excep­tion. Il a comme sujet plus qu’objet : Louise Bour­geois. L’auteur a réa­lisé la pre­mière expo­si­tion de l’artriste en Europe en 1985 à la Gale­rie Lelong. Trente ans plus tard, il a pro­posé la der­nière expo­si­tion direc­te­ment conçue par elle, à la Mai­son de Bal­zac. Fré­mon pro­pose ses rêve­ries du pro­me­neur soli­taire autour de l’artiste ou presque « dedans » puisqu’il écrit le mono­logue inté­rieur de l’artiste.


Soli­taire comme per­sonne, Louise Bour­geois parle, se parle, fait un bilan chao­tique de sa vie qui l’était beau­coup moins que ce qu’elle fei­gnait de lais­ser voir. Fré­mon a de la matière - entre autres ses écrits parus il y a quelques années chez Daniel Lelong (Déconstruction/reconstruction du père). Mais l’auteur ne pro­pose en rien une bio­gra­phie. Il a com­pris com­bien un tel genre n’était qu’une plai­san­te­rie. C’est pour­quoi dans ce texte, si rien n’est vrai tout est plausible.
Le texte vaga­bonde de manière magis­trale dans les humeurs et l’humour de Louise dont la vie com­mença sur une séries d’impasses dans les­quelles l’auteur et son modèle refont les cents pas. Avec la créa­trice, ce qui désap­pro­prie l’être fonde l’oeuvre (l’inverse est vrai aussi). Et si comme le rap­pelle ce texte, l’artiste n’est jamais par­ve­nue à désen­coi­gner cette cre­vasse de silence où tout tomba d’abord en elle, ses -dépôts- rete­nus, rele­vés sont des reliques qui ne peuvent cepen­dant ser­vir à aucune sanc­ti­fi­ca­tion ou exhi­bi­tion d’un secret.


L’oeuvre de Fré­mon comme celle de Bour­geois n’exhibe que le lieu, elle n’est le reli­quaire de rien qui se cache­rait der­rière, elle se veut le sup­port d’aucun culte, d’aucun rituel. L’indice tex­tuel n’est que la fable d’une perte, la fable d’un être pour gérer sa perte. La recherche du secret est donc axée sur la perte et, tout compte fait, ce que l’artiste nous livre n’est que l’aptitude à rendre les choses et les êtres absents.


L’écri­ture et l’art ne sont plus ici comme le jour et la nuit. Ils s’assemblent dans un fleuve char­riant des frag­ments pour que sur­gisse la pul­sa­tion directe des images dont la fixité brus­que­ment se ren­verse, déborde. A ce titre, plus qu’ouvrage sur Louise, ce livre qu’on ne peut pour­tant qua­li­fier « de Louise » est un poème en prose phos­pho­res­cent. Il rap­pelle « que la vérité est une image ». Mais pas n’importe quelle image.


Jean-Paul Gavard-Perret, Le Littéraire, décembre 2015



Dans un texte bref et dense, Jean Frémont imagine une sorte de lettre que la plasticienne Louise Bourgeois s’adresserait à elle-même pour revenir sur sa vie entre France et Etats-Unis, avec un force et une liberté jubilatoires.


Son père voulait un fils, Louise Bourgeois a donc été surnommée Lison par sa mère. Entre Paris et Manhattan, autrefois dans le plaisir, plus âge dans le came, mais toujours dans la liberté et la création, la femme derrière l’artiste se raconte.


Dans un joli texte dense, écrit en effet d’une écriture qu’en d’autres temps on aurait qualifiée de « féminine » et qui correspond bien à l’art de celle qui parle, Jean Frémont travaille la langue comme une matière et exprime avec conviction tout ce qu’il y a de singulier à être artiste, femme et libre, même au 20e siècle. Un texte vibrant, qui coule comme un torrent et dans lequel on se laisse volontiers emporter.


Yaël Hirsch, Toutelaculture.com, décembre 2015

Vidéolecture


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