— Paul Otchakovsky-Laurens

Allégement

Hubert Lucot

Ce volume est la poursuite pour l’année 2006-2007 d’une entreprise mémorielle et autobiographique (une autobiographie de soi-même et de chacun, comme aussi de tous) qui est au cœur de l’œuvre de Hubert Lucot. Commencée dans le registre nostalgique, cette année assène deux coups durs au narrateur. L’un était imprévisible : son épouse et héroïne A.M. subit un terrible accident. L’autre était prévu et même calculé : les Français élisent un président qui appliquera un ultralibéralisme meurtrier. Dans les deux cas, et comme depuis que Hubert Lucot écrit, le narrateur peint les faits plus qu’il...

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La presse

Lucot annonce la couleur :« la phrase sera travaillée comme un vers (je méprise l’expression “prose poétique”) ; le réalisme sera autobiographique et quotidien. » Journal intime, roman, pamphlet, poème, les livres récents de Lucot sont tout ça à la fois, mêlant des thèmes et des tons très divers. Ici, « A. M. », l’aimée, renversée par une voiture sous les yeux d’« H. L. », des souvenirs de leur « tout début » érotique il y a cinquante ans, des voyages en province, des promenades dans Paris, et l’actualité, qui tous réveillent la mémoire. 2006-2007, date de l’écriture, c’est l’élection de « N. Sferatu ». Lucot grince et griffe: « “Travailler plus” a été plébisciter… par les retraités » ; ou: « nombre d’électeurs votent contre ceux [immigrés] à qui ils reprochent de travailler pour eux ». Rien à voir avec les commentaires des penseurs de/au service. Lucot déjoue les discours de son art, qui est d’être attentif aux échos lointains que fait rejaillir un mot, une situation, un objet. Et le livre part de réminiscences à la Proust pour s’achever avec Balzac et ses tableaux du pouvoir. Ajoutez le mordant de Saint-Simon, c’est remonter une lignée. « La littérature est au langage utilitaire ce que le plaisir est à la reproduction de l’espèce », note Lucot.

Jacques Demarcq, Cahier critique de poésie, 2009.



Auteur de livres hermétiques dans les années 60 et d’un livre d’une seule page de douze mètres carré aux phrases entrecroisées, Le Grand Graphe, en 1971, Hubert Lucot mêle volontiers les genres. Son dernier titre, Allégement, tient du journal intime, du roman de moeurs et de la chronique. En précaire équilibre dans le temps présent, celui de l’arrivée au pouvoir de Nicolas Sarkozy (rebaptisé M. Sferatu), l’auteur plonge dans le passé, ses années de jeunesse (1950, 1960, incursions dans les années 70), le temps qui passe, le temps qui reste. Le temps d’un homme, ce vertige, une vie. Cette vie, au-delà des humeurs politiques de l’auteur, est surtout marquée par la rencontre d’une femme, A. M., compagne et héroïne. Les décennies se mêlent dans l’instant, malheurs aussi bien que bonheurs. Cela pourrait être banal, anecdotique, il s’en faudrait d’un cheveu. Mais tout se mêle et s’emmêle finalement si vrai. Mme dans l’instant dont il dit : « Une pointe tragique : TOUT est là, inchangé mais mort. »


Jean-Bernard Vuillème, Le Temps, juin 2009

Et aussi

Hubert Lucot est mort.

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