POÉSIE PRATIQUE
01 janvier 1970, 01h00 par François Matton
Vous en avez sûrement plus qu’assez de voir des situations désagréables venir vous contrarier avec la régularité d’un métronome infernal. Maudit destin. Comment pourriez-vous vous émerveiller de quoi que ce soit dans de telles conditions ? Ne vous laissez pas faire.
Donnez aux situations le visage qui vous plaira. Variez les apparences, multipliez leur masque. Plutôt que d’être la marionnette du destin, devenez le marionnettiste. Ce pouvoir vous sortira du sentiment d’impuissance qui vous désespère. Pour cela, voici un petit exercice qui vous mettra sur la voie.
Représentez-vous par l’imagination n’importe quelle image. La première qui vous vient fera l’affaire : un coucher de soleil derrière le Mont d’Or, le grand canal au pied de la ville, le portrait d’un inconnu qui vous offre des fleurs. Ou tout autre chose, cela n’a aucune importance. Le principal est de parvenir à établir une image mentale et de vous y tenir. À vous. Allez-y, faites-le. Oui, maintenant.
C’est fait ? Très bien.
Maintenant faites dire à cette image quelque chose et son contraire. Projetez dessus tout ce qui vous passe par la tête. Par exemple, sous l’image du coucher de soleil, imaginez écrit : « Cliché désespérant de banalité », et puis : « Un spectacle inoubliable ». Ou encore : « Quel trou ! Moi qui voulais vivre à New York… », et puis : « Quel site admirable, je ne m’en lasserai jamais. »
Voyez avec quelle docilité l'image se conforme à ce qu'on lui fait dire. Riez de voir combien tout ce qui vous entoure peut ainsi prendre un sens différent au gré de votre fantaisie. Parfait, vous voilà plus ouvert que jamais à la poésie.