En repensant à Paul en ce début janvier 2022, 4 ans après sa mort, c’est de l’éditeur dont je me souviens bien sûr, mais aussi de l’auteur de Sablé-sur-Sarthe, Sarthe et d’Editeur, les deux films qu’il avait réalisés en 2007 et 2017. J’avais été surpris d’apprendre que, lycéen, il s’était rêvé cinéaste, avait même envisagé d’étudier à L’IDHEC (L’Institut des hautes études cinématographiques), l’ancêtre de la Fémis, mais que sa mère l’en avait dissuadé au prétexte qu’il prenait des photos minables (*).
Je repense surtout à l’un des derniers mails que nous avions échangés. Je lui avais envoyé un texte sur mon projet en cours, Mon histoire avec Robert, livre sur les rêves qu’on ne réalise pas ou plus tard ou d’une autre manière et j’avais ajouté que ce livre serait placé sous le signe de Pierre Bergounioux :
Il y a en nous on ne sait trop quelle tension de tout l’être vers l’achèvement des tâches que nous nous sommes proposées (…) L’insatisfaction qui pourrait naître de ce que cette tâche n’a pu être menée à terme va survivre indéfiniment jusqu’à ce que, à quelque temps de là, dix, vingt, cinquante années plus tard, nous retournions vers celui là-bas qui réclame, fassions droit à sa demande, parachevions la tâche qu’il s’était lui-même prescrite et alors, mais alors seulement, ce petit fantôme qui marchait à nos côtés consentira à disparaître dans l’oubli.
Paul m’avait répondu ceci :
« …votre projet (…) résonne singulièrement pour moi alors que je suis en train de terminer mon deuxième long métrage et que j’ai à mon tour l’impression de voir disparaître sous mes yeux le petit fantôme dont parle Bergounioux… »
(*) Raphaëlle Leyris, Le Monde, 26 novembre 2017.